LE PIEGE DE LA PROJECTION PARENTALE, QUAND VOTRE RÊVE DEVIENT SON FARDEAU

LE PIEGE DE LA PROJECTION PARENTALE, QUAND VOTRE RÊVE DEVIENT SON FARDEAU

Projection parentale amour devient pression

« Je déteste le tennis ! Je le déteste de tout mon cœur ! Et pourtant, je continue… ». Ces mots, ce sont ceux d’André Agassi. Ils sont choquants surtout sortant de la bouche d’un des plus grands champions de tennis. Derrière toutes les victoires en grand chelem et les fans qui l’adulaient, se cache une histoire bien moins reluisante : celle d’un enfant façonné, dirigé et, d’une certaine manière, pris en otage par le rêve de son père. Son histoire est un exemple marquant des dégâts de la projection parentale.

Mike Agassi, ancien boxeur iranien qui a participé à deux Olympiades, avait un objectif clair : faire de son fils une légende. Dès l’enfance, André a été confronté à des entraînements intensifs, à un robot lanceur de balles baptisé ‘le dragon’, et à une pression constante pour performer. Ce rêve paternel, projeté sur les épaules d’un enfant, a fini par étouffer son propre rapport au sport.

Le cas d’Agassi est extrême, mais il met en lumière un phénomène bien plus courant qu’on ne le croit : la projection parentale. Quand le rêve d’un parent prend le pas sur les aspirations réelles de l’enfant, cela peut devenir un fardeau lourd à porter. Alors, comment reconnaître ce piège ? Et surtout, comment en sortir ? C’est ce que je vous propose de découvrir dans cet article.

Projection parentale phénomène complexe

Si j’essaye de vous proposer une définition simple de ce mécanisme, je pourrais dire : « La projection parentale est un mécanisme par lequel un adulte transfère ses désirs, ses ambitions, ses échecs ou ses frustrations sur son enfant ». Dans la très grande majorité des cas ce phénomène est inconscient. Bon nombre de parents qui se projette dans les réussites de leurs enfants nient ou se voilent la face lorsque l’on discute de cette tendance avec eux. Cependant ce mécanisme de fonctionnement influence profondément la manière dont un parent accompagne son enfant dans son parcours sportif et/ou scolaire.

Dans le sport, cela peut se traduire par des attentes élevées : un parent qui n’a pas pu faire carrière dans le football veut que son fils aille plus loin que lui. Une mère passionnée de danse voit dans sa fille un reflet de ses propres rêves interrompus. Sans le vouloir, l’enfant devient un prolongement du parent. Il porte les espoirs familiaux, parfois au détriment de son propre plaisir et de sa propre identité.

Dans les études, le parent veut plus, veut mieux que ce qu’il a pu réaliser lui-même. Et on comprend tous que vu comme cela c’est un sentiment qui semble partir d’un bon sentiment et tout à fait acceptable.

Il est d’ailleurs essentiel de comprendre que ce phénomène ne naît pas d’une mauvaise intention. Il est souvent le fruit d’un amour immense, mais aussi d’un besoin de réparer ou de revivre à travers l’autre.

La projection parentale prend racine dans des dynamiques émotionnelles profondes. Elle peut apparaître dès le plus jeune âge de l’enfant, et très souvent, comme expliqué plus haut sans que le parent n’en ait conscience.

Je vous propose de parcourir, avec un esprit critique, quelques sources courantes de projection :

Les rêves non réalisés : un parent qui a dû abandonner sa passion sportive pour des raisons personnelles ou financières peut chercher à la vivre à travers son enfant.

L’identification : lorsqu’un parent voit en son enfant un « mini-lui », il peut penser que ce qui était bon ou souhaitable pour lui l’est aussi pour l’enfant.

La valorisation sociale : dans certaines familles ou cercles sociaux, avoir un enfant performant dans un sport valorise indirectement les parents. La réussite devient une forme de reconnaissance.

La peur de l’échec : certains parents, angoissés par l’idée que leur enfant passe à côté d’une opportunité, adoptent une posture de contrôle.

Alors qu’en est-il pour vous ? Êtes-vous (sans le vouloir) dans une de ces logiques. D’ailleurs il est important de comprendre que ces facteurs émotionnels s’entremêlent souvent. Et le fait que ces émotions se mêlent, rend l’identification de la projection parentale difficile à identifier

Regard des parents

Pour identifier votre projection parentale, il vous faudra passer par un véritable travail d’introspection. Certains signes sont subtils, mais extrêmement révélateurs.  

Voici quelques signes qui ne trompent pas :

– Vous êtes plus affecté que votre enfant après une défaite.

– Vous parlez souvent de ses résultats à d’autres parents, avec fierté ou inquiétude.

– Vous planifiez son avenir sportif sans lui demander son avis.

– Vous utilisez des expressions comme « on doit s’entraîner plus » ou « on peut mieux faire ».

– Vous ressentez une forme de déception quand il exprime une envie différente (changer de sport, ralentir, s’amuser plus).

Ces signes montrent une confusion entre vos attentes et ses besoins réels.

Mais maintenant que vous avez repéré certains signes, que devez-vous en faire ?

Être parent d’un jeune sportif n’est pas une chose aisée. Il nous faut trouver un équilibre entre encouragement, présence et respect de l’autonomie. Pour savoir si vous êtes dans la projection ou dans le soutien, voici un petit test simplifié que vous pouvez réaliser :

– Vous êtes plus dans le soutien si vous demandez : « Qu’est-ce que tu ressens ? », « Qu’est-ce que tu veux faire ? », « Qu’est-ce qui te fait plaisir ? »

– Vous êtes plus dans la projection si vous affirmez : « Tu dois continuer », « Tu vas gâcher ton talent », « Tu ne peux pas abandonner maintenant »

Le soutien valorise le processus, l’apprentissage, les efforts, les émotions. Par contre, La projection, elle, place plutôt le résultat au premier plan.

adolescent démotivation projection parentale

La projection parentale peut engendrer des effets très négatifs. Et cela même si les intentions étaient nobles. Parmi les conséquences les plus fréquentes de la projection parentale, on retrouve :

– L’enfant perd le plaisir initial du sport. Il joue par obligation ou par peur de décevoir.

– Il développe une anxiété de performance, se mettant une pression constante pour répondre aux attentes.

– Sa motivation devient extrinsèque : il ne joue plus pour lui, mais pour faire plaisir.

– Il peut se refermer émotionnellement, ne se sentant plus libre d’exprimer ses doutes ou ses envies de changement.

– Dans les cas extrêmes, il arrête brutalement le sport ou entre en conflit avec ses parents.

Ces conséquences sont souvent invisibles au début. Elles s’installent lentement et de manière insidieuse. D’où l’importance que vous restiez vigilants.

Heureusement, il est possible de sortir de cette dynamique. Voici quelques pistes concrètes :

1. Posez-vous régulièrement cette question : « Est-ce que je fais ça pour lui ou pour moi ? »

2. Redonnez-lui le choix : dans le rythme, le type de sport, le niveau d’engagement.

3. Valorisez les efforts, les apprentissages, les progrès – pas seulement les résultats.

4. Créez des moments de discussions où l’enfant peut exprimer ce qu’il ressent sans jugement.

5. Acceptez que ses rêves soient différents des vôtres. Et qu’il puisse changer d’avis en grandissant.

Chaque parent fait des erreurs, mais ce qui compte, c’est la capacité à les reconnaître et à évoluer, à changer.

Être parent d’un jeune sportif, c’est aimer avec humilité. C’est accepter que nos rêves ne soient pas les siens, et que sa réussite ne sera peut-être pas celle qu’on imaginait… mais qu’elle sera la sienne.

La projection parentale, bien que naturelle, peut être réellement destructrice pour votre enfant.

Nier que vous aussi vous projetez inconsciemment vos désirs de réussite, c’est risquer de vous empêcher de changer. Et surtout priver votre enfant de la liberté de se construire son propre chemin.

Par contre, en prenant conscience de ce biais, en réajustant notre posture, on lui offre quelque chose de bien plus précieux que n’importe quelle victoire sur un terrain de sport : la confiance. On a confiance en sa capacité à faire ses propres choix, à se relever de ses propres erreurs et à se construire son propre chemin.

Parfois le plus bel acte d’amour c’est de lâcher prise !

Dans le même sujet vous avez sur ce blog un article qui parle de ce rôle parfois difficile à tenir entre implication et lâcher prise. « La sur-protection parentale freine l’épanouissement »

Regard parental accompagnement

Accompagner c’est être là, en retrait, prêt à tendre la main… mais sans tirer, sans pousser.

Le rôle du parent n’est pas d’écrire l’histoire de son enfant, mais de le laisser en devenir l’auteur, tout en étant un lecteur attentif et encourageant.

J’espère de tout cœur que la lecture de cet article vous permettra de mieux vivre votre relation avec votre enfant. Et si à la lecture de ces quelques paragraphes, vous vous êtes rendus compte que vous aussi vous avez pu tomber, à certains moments, dans ce piège de la projection parentale, continuez la remise en question. Mais surtout faites-le de manière bienveillante.

Si vous vous voulez creuser plus loin dans ce sujet je vous propose cet excellent article « l’identification projective parentale« 

Et enfin, si vous avez lu cet article jusqu’au bout, pourriez-vous me laisser un petit commentaire pour que je puisse moi aussi m’enrichir de vos réflexions.   

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